Journées européennes des personnes handicapées 2022
La Commission européenne (CE) organise une conférence annuelle en coopération avec le European Disability Forum (EDF) pour marquer la Journée internationale des personnes handicapées (samedi 3/12/2022). Cette année, la conférence a eu lieu les 24 et 25 novembre à Bruxelles. Le Belgian Disability Forum asbl (BDF) y était représenté par Charlotte Aelbrecht.
Le programme comportait trois thèmes. Tout d'abord, il a été question des jeunes en situation de handicapés. Ensuite, les instruments mondiaux de protection des droits des personnes handicapées ont été expliqués. Ensuite, le thème de la violence contre les personnes handicapées a été abordé.
Enfin six villes ont reçu un Access City Award pour leurs réalisations en faveur de l'accessibilité pour les personnes en situation de handicap.
Parmi les intervenants figuraient des personnes handicapées ainsi que des décideurs politiques (CE, représentants des présidents actuels et futurs du Conseil de l'UE), des défenseurs des droits des personnes handicapées (ONG) et des experts (tels que le rapporteur spécial des Nations unies sur le handicap, des membres du Conseil de l'Europe et du Comité des droits des personnes handicapées des Nations unies...).
Session d'ouverture
Les personnes en situation de pauvreté présentent un risque de pauvreté plus élevé que les personnes qui ne sont pas en situation de pauvreté. Les personnes en situation de handicap ont moins accès à l’emploi et sont plus susceptibles de vivre dans des ménages à faible revenu. Au final, l'augmentation du coût de la vie touche plus fortement les personnes en situation de handicap.
La CE a répondu à ces chiffres en soulignant que le pilier européen des droits sociaux vise à employer au moins 78 % de la population de l'UE d'ici 2030 et que le paquet "emploi" pour les personnes handicapées jouera un rôle crucial pour augmenter le taux d'emploi de ces dernières.
A son tour, le président du FED a mis l'accent sur la capacité de vivre dans la dignité avec une protection et une assistance sociales adéquates.
Les développements supplémentaires conformément à la stratégie européenne en matière de droits des personnes handicapées 2021-2030 sont :
- Le lancement de la plateforme sur le handicap ('Disability Platform') : échange d'expériences, discussion des initiatives politiques, établissement d'une coopération entre la CE, les États membres et les parties prenantes ;
- Le lancement d'Accessible EU, le centre européen pour l'accessibilité, prévu pour la fin de l'année 2022. Il devrait superviser la mise en œuvre cohérente de l'accessibilité dans tous les domaines politiques ;
- Le développement de la European Disability Card (EDC) est prévu en 2023. Cela permettra d'assurer la reconnaissance du statut de personne handicapée au regard des différentes compensations dans tous les Etats membres.
Jeunes en situation de handicap
Les jeunes qui se sont exprimés ont expliqué les difficultés qu'ils ont rencontrées. Les obstacles sur le marché du travail reviennent souvent : il est très difficile de faire valoir son "droit au travail" en tant que personne en situation de handicap. En outre, il est également difficile de poursuivre ses études en raison du faible niveau d'aide publique, et les jeunes en situation de handicap ne peuvent pas toujours se permettre d'effectuer des stages non rémunérés.
A ce niveau, le Forum européen de la jeunesse encourage la création d'une directive européenne sur les stages. Cela devrait garantir un salaire minimum et l'accès à la protection sociale.
La difficulté pour les jeunes en situation de handicap de participer aux échanges Erasmus+ a également été brièvement expliquée. Pour participer à un projet Erasmus+, il faut normalement être étudiant. De plus, il faut obtenir le financement des adaptations nécessaires, ce qui n’est pas toujours facile. Mais il est aussi possible de participer à un programme Erasmus+ sans être étudiant, par l'intermédiaire d'une asbl qui organise un projet d'échange et reçoit le soutien de l'UE par le biais des 'programmes d'échange de jeunes'. Cependant, au sein de ces échanges, il est difficile de financer les adaptations nécessaires.
Instruments mondiaux de protection des droits des personnes handicapées
Au niveau de l'UE, le principal instrument est la stratégie européenne en matière de droits des personnes handicapées 2021-2030. Des efforts supplémentaires sont déployés pour prendre en compte le handicap dans tous les domaines d'action. Par exemple, des coordinateurs pour les matières relatives aux personnes en situation de handicap dans toutes les institutions de l'UE et la Disability Platform (Plateforme pour le handicap) a été lancée.
En ce qui concerne spécifiquement les langues des signes, il a été mentionné que des discussions sont en cours au sein de l'UE sur la reconnaissance des langues des signes comme langues officielles de l'UE. Toutefois, une décision ne sera pas prise dans un avenir proche.
Au niveau de l'ONU, le rapporteur spécial sur le handicap visite les Etats membre pour évaluer les facteurs qui montrent les progrès et identifier les défis restants. En outre, le rapporteur spécial traite également les plaintes. Sa déception à l'égard de l'UE est principalement liée au financement d'institutions pour personnes handicapées qui n'accordent pas suffisamment d'attention à l'importance de l'autonomie de leurs résidents et à la mise en œuvre insuffisante du modèle social du handicap.
De son côté, le Comité des Nations unies pour les droits des personnes handicapées (UNCRPD) formule des recommandations aux pays concernant la mise en œuvre de la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées.
Au niveau du Conseil de l'Europe, le Commissaire aux droits de l'homme est chargé de promouvoir les normes de l'UNCRPD. C’est ainsi qu’il :
- soutient le droit de la personne en situation de handicap à vivre de manière autonome dans la société et non pas en étant isolé dans une institution et
- s'oppose au projet de protocole additionnel à la Convention d'Oviedo. En effet, le protocole maintient une politique de soins de santé mentale basée sur la coercition, ce qui est incompatible avec les principes contemporains des droits de l'homme et le modèle social de l’UNCRPD.
Il existe également le Comité européen des droits sociaux, qui veille au respect de la Charte sociale européenne. Cela comprend :
- le droit à l'éducation et à la formation professionnelle,
- le droit de travailler avec des aménagements raisonnables,
- promouvoir l'inclusion sociale et la participation pleine et entière...
Au niveau des organisations de défense des droits des personnes handicapées (asbl), l'EDF occupe une position centrale. Elle envoie des rapports alternatifs au Comité des droits des personnes handicapées des Nations unies. Ces rapports contiennent des informations provenant de différents asbl de l'UE sur les lacunes de l'UE dans la mise en œuvre de l’UNCRPD. Certaines des lacunes identifiées sont les suivantes :
- des mesures d'application insuffisantes au niveau national,
- l'UE ne vérifie pas si toutes ses politiques et/ou celles des États membres répondent aux normes de la CNPDH,
- le manque de collecte de données statistiques concernant les personnes en situation de handicap...
Violence à l'égard des personnes handicapées
Les personnes handicapées sont plus susceptibles de subir des violences. Les sont particulièrement touchées par les mariages forcés, les avortements, les stérilisations forcées.
Il y a aussi la question de la violence contre les personnes âgées qui vivent souvent dans des institutions. Les personnes âgées ne disposent pas d'un instrument de protection distinct et sont donc couvertes par l’UNCRPD. Souvent, les personnes âgées ne sont pas informées de leurs choix et leur consentement aux mesures est seulement supposé, et non confirmé.
Les mesures prises au niveau de l'UE sont les suivantes :
- Il existe une directive sur les droits des victimes qui fixe des normes minimales en matière de droits, de soutien et de protection des victimes de la criminalité ;
- Une proposition de directive visant à combattre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique a été présentée. La criminalisation du viol, des mutilations féminines et de la cyberviolence (y compris le partage non consensuel d'images intimes) y occupe une place centrale ;
- L'UE s'efforce d'adhérer à la Convention d'Istanbul sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique ;
- Début 2023, la CE publiera une recommandation sur les pratiques préjudiciables aux femmes ;
- D'ici la fin de l'année 2023, le numéro d'urgence de l'UE (116 016) pour les victimes de violences à l'égard des femmes sera opérationnel. Dans toute l'UE, le numéro d'urgence sera le même, mais le centre d'assistance restera national ;
- La CE finance des projets qui combattent la violence - il y aura un nouvel appel à projets en décembre (2022) (CERV-2022-DAPHNE).
Conclusions
Conclusion selon les mots de John Patrick Clarke, vice-président d'EDF : "Chaque jour devrait être une journée des personnes handicapées. Chaque jour devrait être un jour de discussion sur la façon dont les sociétés sont façonnées, un jour de lutte pour une société inclusive."